La jeunesse des soeurs Isy

On dit parfois des soeurs Isy qu'elles auraient très bien pu éclore d'elles même dans la nature... Ces racontards sont emplis de poésie, mais c'est bien sûr leur mère qui les enfanta, à la régulière.

Takit, est née durant la fin d'un automne.
Sa mère était près d'un jardin fleuri, prenant l'air avec un sourire, lorsqu'elle perdit les eaux. La nouvelle née a pu ainsi découvrir très rapidement les joies de la nature, ses pleurs de séparation se calmant déjà au contact de l'herbe humide, sous un sourire attendri de sa mère.C'est en la prenant dans ses bras que sa mère s'aperçut qu'elle avait des marques de naissance sur la joue droite, s'accordant fort bien à l'endroit.
Takit a commencé à marcher à la fin de son sixième mois, étonnant ses parents. Pendant ses deux premières années, elle a été une enfant peu contraignante mais particulièrement active. Curieuse de tout, elle ne restait jamais à rien faire, sans pour autant tomber dans l'excès. Ses pleurs ne se faisaient entendre qu'en de rares occasions. Elle avait l'air particulièrement à l'écoute de la nature, y trouvant sans doute une certaine sérénité. Peut être était-ce un héritage, ses parents étant eux même proches de la flore : son père était métayer et sa mère s'occupait de plusieurs jardins de fleurs du village.
Dès sa quatrième année, Takit semblait déjà être dans l'attente de sa petite soeur, venant souvent se coller puis caresser le ventre de sa mère, d'une délicatesse touchante.

Nythrate, est née dans le même jardin que son aînée, quatre années et demie après, pendant un printemps radieux. Quelle ne fût pas la surprise de ses parents lorsqu'ils virent des tâches formant une fleur sur sa joue! Beaucoup pensent encore aujourd'hui que ce n'est pas un simple hasard. "Les soeurs Isy ont écloses au même endroit!"
Dès qu'elle a su marcher, et épaulée par sa grande soeur, Nyty ouvrait de grands yeux curieux et les posaient avec innocence sur tout ce qu'elle croisait... A ses manières, on pouvait tout de suite voir qu'elle était bien plus émotive et sensible que sa grande soeur.
Elle était un peu gourmande et aimait particulièrement les choses sucrées, comme le lait au miel que lui donnait sa mère.

Une grande complicité s'installait entre les deux soeurs, jeunes mais déjà inséparables. Takit semblait veiller sur Nyty et l'épaulait constamment, et Nyty usait de son sourire et ses yeux communicatifs pour faire sourire sa soeur d'un air béat.



Durant les journées de labeur de leur père, leur mère amenait souvent les soeurs Isy dans ce jardin... Celui où elles avaient vu le jour. Elle semblaient y trouver toutes les deux quelque chose, en jouant ensemble sur l'herbe. Nythrate poussait sa grande soeur assise, pour la faire tomber, à la fois avec détermination et tendresse, dans le but de se coller à elle ou lui grimper dessus, une fois à terre. Takit se laissait faire volontiers, pour la faire sourire et rire. Nyty avait un an, et profitait déjà de la gentilesse débordante de sa soeur à son égard. Très caline.
Il y'avait quelque chose d'étrange et de magique à voir leurs joues collées l'une à l'autre... leurs marques de naissance semblaient n'en former qu'une.

La petite famille dû déménager de son village serein, les terres que cultivaient leur père promises à être en friche pendant un temps. Leur propriétaire ne désirait plus les faire cultiver et cherchait un acquéreur potentiel pour le terrain. Le jour du départ, ils passèrent devant le jardin, et les soeurs lui firent des grands gestes d'au revoir, avec toute leur innocence. En les voyant faire, leurs parents étaient à la fois touchés et désolés.
C'est à Poéta qu'ils allèrent. Connaissant l'attirance des deux soeurs pour la nature, ils ne voulaient surtout pas la restreindre.

Leur maison était tout aussi accueillante que la précédente, leur père y faisait quelques travaux d'aménagement pendant son temps libre.
La cadre était idéal pour les filles, les plaines d'Akarios étaient vraiment un endroit agréable, et elles y passaient une grande partie de leur temps. Travaillant les cultures non loin, on entendait leur père râlant après les bestioles qui venaient déjà manger une partie des futures récoltes.

Nyty s'était particulièrement attachée à un arbre, auquel elle avait donné un nom : elle avait posé la paume de sa main contre son tronc, restant silencieuse une bonne minute, avant de sortir ce qu'elle ressentait être son nom, sûre d'elle : "Alphonse". Takit en était restée bête sur le coup, mais avait approuvé en venant prendre la main de sa soeur.
Elles venaient souvent s'abriter sous son tronc et ses racines protecteurs, pouvant parfois s'y assoupir, accollées l'une à l'autre.

Une chose était sûre, si leurs parents les cherchaient, ils savaient où les trouver!
Leur mère venait parfois avec elles, pour s'y ressourcer, et surtout observer leur complicité avec un sourire aux lèvres.
Les jours et les nuits se succédaient et elles grandissaient, toujours inséparables.